Maxence Rifflet

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La photographie comme expérience

Pourquoi photographier dans un monde saturé d’images ? Avant d’être une production visuelle, la photographie est pour moi une activité qui permet une expérience dans le monde. Ainsi, l’ensemble de mes œuvres est le résultat d’un processus qui relève à la fois de la perception, de l’interaction et de l’information (donner une forme). Les expériences que je mène sont le plus souvent collectives et appellent du récit.  J’en rends compte à travers des livres, des expositions ou des installations.  Si j’aborde des situations et des questions variées, j’ai une curiosité constante pour les manières d’habiter.

Je m’intéresse à la photographie autant comme outil d’enregistrement que comme trace lumineuse, plastique et matérielle, sans antagonisme entre la description et le travail des formes. Ainsi, je mène des enquêtes avec un souci de précision documentaire tout en ayant une pratique d’atelier et de laboratoire résolument expérimentale, du tirage à l’image-objet.

Au fil des expériences, j’ai compris l’intérêt d’associer plusieurs points de vue sur une même réalité, que cela produit des formes et de l’information. Ainsi je suis attentif au regard de celles et ceux que je rencontre dans les situations que je me suis donné pour projet de documenter. Les échanges que provoque ma présence modifient le travail jusqu’à en constituer le sujet. La photographie devient un outil d’interaction.

Voici une rapide traversée des principaux projets.

Au sein du groupe Rado, j’ai répondu, entre 2011 et 2014 à une commande publique du Centre national des arts plastiques concrétisée par une exposition au Centre international d’art et du paysage de Vassivière en 2014. À cette occasion, j’ai réalisé le film Les ouvriers du tri, une boucle de 16 minutes qui décrit, au plus près des corps, le travail quotidien de femmes et d’hommes sur une chaîne circulaire de tri de déchets.

Entre 2007 et 2010, j’ai concentré mes recherches sur deux territoires pittoresques : la route dite « touristique » qui relie Cherbourg à Coutances, et les « boucles » de la Seine ; j’y ai produit un ensemble de tableaux photographiques issus d’une réflexion sur le paysage. Deux expositions ont été présentées, l’une à Cherbourg, l’autre à Rouen, accompagnées du livre Une route, un chemin (mention spéciale du prix Nadar 2010) édité par Le Point du jour. En 2006, j’ai exposé aux rencontres internationales de la photographie à Arles un ensemble d’images sur les mutations de la vallée du Yangtse en Chine.

Parallèlement à ces travaux, j’ai réalisé de nombreux projets d’expérimentation artistique au sein de structures pédagogiques et sociales. Le livre Fais un fils et jette-le à la mer (2004), publié avec Yto Barrada et Anaïs Masson, retrace une expérience menée à Marseille et à Tanger avec des adolescents marocains dont la pratique photographique était l’enjeu d’une réflexion sur l’immigration clandestine.

Entre 2016 et 2018, j’ai photographié dans sept prisons en collaboration avec des prisonniers et des prisonnières. Ce projet a donné lieu à une série d’expositions : au Centre photographique Rouen Normandie (2019), et dans les centres d’art Gwinzegal (Guingamp, 2020), Le Bleu du ciel (Lyon, 2022) et Le Point du jour (Cherbourg, 2022). Le livre Nos prisons a paru en mai 2022 aux éditions du Point du jour.

Lauréat de la troisième édition de la commande publique du Cnap « Les regards du grand Paris », j’ai réalisé un ensemble d’œuvres à partir d’une enquête menée sur et avec des travailleurs et travailleuses du nettoyage à travers l’agglomération (« Des mondes parallèles », 2019). Cette recherche a fait l’objet d’une exposition présentée conjointement aux Magasins généraux (Pantin) et au Musée Carnavalet (Paris)

Entre 2020 et 2023, j’ai réalisé un Observatoire photographique des paysages de la vallée de la Seine en collaboration avec Claire Tenu qui a notamment fait l’objet d’une exposition à la Maison de l’architecture de Normandie à l’automne 2024.

Je travaille actuellement en collaboration avec mon frère, le musicien Sylvain Rifflet, à un ensemble de pièces photo-musicales réalisées à partir d’enregistrements et de photographies de situations de travail. Notre objectif est à la fois de concevoir une installation et d’utiliser les images pour des concerts. Cette recherche fait suite à une précédente collaboration en 2014 autour de la figure de Moondog, dont le résultat a été présenté dans le cadre du festival Banlieues Bleues et de Jazz à la villette.

Par ailleurs, j’enseigne à l’école supérieure d’art et média de Caen-Cherbourg.